Ce matin, l’automne est vif, le ciel clair, et je vais au vent sans regret ni souci. Ce matin j’ai le front gai et je T’adresse, Seigneur, ma prière pour les jours légers, la prière allègre.

 

Je sais qu’il est de mode et de mise de Te réserver les chagrins, de T’invoquer dans la peur, l’angoisse, la détresse, le deuil, je le fais aussi bien sûr. Mais curieusement, les jours de joie, on T’oublie. A la rigueur aux grandes fêtes votives, les Pâques rayonnantes, les Noëls à demi païens, les jours de délivrance, de victoire, de bombance, on Te chante: deux Jubilate, un Ressurexi. Mais les petits jours légers, les petits matins frais et gais n’ont pas d’importance, nul n’a besoin de Ta présence, et l’on T’oublie.

 

Je parle à mon Dieu dans la joie petite qui ce jour m’habite. Je Lui en fais confidence. Je Lui offre les fûts argentés des bouleaux, ce bruant à tête jaune sur son fil télégraphique, le vent qui soulève doucement les feuilles rousses et, quand j’y marche, ces craquettements de souris. Tu es là mon Dieu, présent dans mon innocent batifolage, dans cette fleur qui me sourit. Je suis avec Toi sans honte ni défi, ni besoin de grandiloquence. Tu es là dans mon coeur, par les petits matins légers. Aussi.
Henri Brunel, "Prière allègre"
dans: Prières pour ceux qui n’ont pas le temps (collection Foi Vivante / Éditions L’Atelier)

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